Perspectives d’avenir de l'OTAN
La fin de la guerre froide fut ressentie comme une victoire de l’OTAN. Pourtant la bipolarité allait rapidement remettre en cause ses objectifs et son fonctionnement, et finalement entraîner une remise en question de sa nature. Signé pour faire face à la menace soviétique le 4 avril 1949 à Washington, le Traité de l’Atlantique Nord reposait essentiellement sur l’article 5 qui définit le principe de la défense collective : tout membre de l’Alliance attaqué peut compter sur la promesse d’assistance mutuelle de ses partenaires en cas d’agression. C’est sur la base de ce traité, qui prévoit de promouvoir aussi la coopération économique, politique et culturelle, que se mettent en place les structures d’une Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).
L’OTAN est la seule organisation de sécurité occidentale en place et sans laquelle la sécurité européenne n’aurait pas de point d’encrage. En outre, elle est la seule organisation transatlantique qui lie les Etats-Unis au Vieux Continent au travers d’engagements, de procédures, de traditions et de dispositifs de déploiement.
A l’heure actuelle, les fonctions originelles de l’OTAN sont devenues anachroniques avec la fin de
l’ennemi communiste et son éclatement. La volonté Russe de s’attirer les crédits et les marchés occidentaux en fait désormais plus une nouvelle alliée qu’une future ennemie et le problème ALLEMAND est résolu. En somme c’est la nature même de l’OTAN qui a été remise en cause.
Si la menace soviétique soudait les membres de l’Alliance dans la nécessité de répondre rapidement aux crises, sa fin a mené la situation inverse. La grande menace du passé avait sans cesse contraint les pays membres de l’OTAN à des évaluations et des actions communes, tandis que les nouvelles menaces, beaucoup plus diffuses, complexes et moins directement susceptibles de mettre en péril la sécurité du continent, produisent des évaluations et des raisons différentes pour ne pas agir.
Les décisions prises par l’actuelle administration américaine dans le domaine de la politique de sécurité, avec l’engagement unilatéral de forces en Afghanistan, posent de nombreuses questions. Elles inquiètent notamment ceux qui veulent renforcer la sécurité internationale en privilégiant le développement des institutions multilatérales ainsi que la coopération et le dialogue politique.
I/.L’OTAN ET L’HYPER PUISSANCE STRATEGIQUE AMERICAINE:
Les décisions unilatérales prises par l’actuelle administration américaine dans le domaine de la politique de sécurité minent les efforts de l’OTAN qui gagnerait à s’appuyer sur des instruments juridiques globaux, promouvant la justice, la paix et la solidarité, afin d’atténuer ses dissensions et de renforcer sa crédibilité.11. Rôle et place de l’OTAN.
L'OTAN a été créée par le Traité de l'Atlantique Nord signé à Washington le 4 avril 1949, instaurant une alliance de dix-neuf Etats démocratiques d'Europe et d'Amérique du Nord qui veulent sauvegarder leur sécurité commune par le biais d'une coopération politique et militaire.
Après la fin de la Guerre froide et de la division de l'Europe, l'Alliance, en conservant son objectif fondamental, la défense collective de ses membres, s'est réorganisée afin de participer à l'élaboration de structures de sécurité coopérative pour l'Europe tout entière. Elle a transformé ses structures politiques et militaires pour s'acquitter de tâches de maintien de la paix et de gestion de crises en coopération avec des pays non-membres de l'Alliance et d'autres organisations internationales.
Dans ce sens, Les 21 et 22 novembre 2002, à Prague le sommet de l'OTAN a mis en relief la question du sens de cette organisation et du rôle qu'elle a à jouer. Le Président Vaclav Havel l'a dit dans une interview pour la Radiodiffusion tchèque, trois jours après la fin de la réunion de l'Alliance atlantique à Prague. D'après lui, celle-ci doit faire front, aujourd'hui, à de nouvelles menaces, dont le terrorisme et la prolifération d'armes de destruction massive. Des menaces exigeant une transformation de l'OTAN.
En effet, La lutte contre le terrorisme a d'ailleurs été l'une des questions soulevées lors de ce sommet. Les vues en la matière, on le sait bien, ne sont pas entièrement unanimes entre différents Etats, on peut trouver des attitudes contradictoires. Petr Uhl estime que la politique américaine concernant la lutte contre le terrorisme est malheureuse. Cette lutte est orientée contre les conséquences qui sont toujours les mêmes, point contre les causes. Selon lui, il faut lutter contre la misère, contre l'injustice économique dans le monde. Les interventions policières à la place des interventions militaires. Dans cette perspective, pour lutter contre le terrorisme, on n'a pas besoin de l'OTAN. Il faut renforcer la sécurité collective, les actions policières et, peut-être, les services de renseignements.
Parallèlement, et dans le cadre du "Conseil de partenariat Nord-atlantique", forum intergouvernemental regroupant 44 pays, un "Partenariat pour la paix" (PPP) a instauré la coopération politique et militaire avec d'autres pays d'Europe, dans le respect des principes démocratiques qui sous-tendent l'Alliance: Albanie, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Biélorussie, Bulgarie, Croatie, Estonie, Finlande, Géorgie, Kazakhstan, République kirghize, Lettonie, Lituanie, Moldavie, Ouzbékistan, Roumanie, Russie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, ex-République yougoslave de Macédoine, Turkménistan, Ukraine. Le PPP a facilité la constitution de la Force multinationale d'application des dispositions militaires de l'Accord de paix pour la Bosnie (IFOR). De la même manière, elle contribue directement à la Force de stabilisation (SFOR) que dirige l'OTAN et à laquelle participent 15 pays du PPP.
De surcroît, le Traité sur l'Union européenne de Maastricht définit l'UEO, (Union de l'Europe occidentale), comme une partie intégrante du développement de l'Union européenne et comme le moyen de renforcer le pilier européen de l'Alliance atlantique. L'UEO élabore et met en oeuvre les décisions et actions de l'Union européenne dans le domaine de la défense. En juin 1996, les Ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'OTAN ont qualifié la construction d'une Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'OTAN de "partie essentielle de l'adaptation des structures de l'Alliance". L'IESD a pour objet de permettre à tous les Alliés européens d'exercer de plus grandes responsabilités pour leur sécurité.
L'Alliance s'est donc engagée à adapter ses structures et ses procédures afin d'améliorer la coopération avec l'UEO. Elle s'est déclarée prête à mettre à disposition les moyens collectifs de l'OTAN pour des opérations de l'UEO menées par les Alliés européens dans le contexte d'une Politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Les dirigeants des pays de l'Alliance ont entériné le concept de Groupes de forces interarmées multinationales (GFIM), qui prévoit la mise sur pied de capacités militaires séparables mais non séparées susceptibles d'être déployées par l'OTAN ou l'UEO.
De plus, l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (l'OSCE), travaille en relations étroites avec l'OTAN. Organisation régionale, qui rassemble tous les pays d'Europe, le Canada et les Etats-Unis autour d'un vaste concept commun de sécurité, fondé sur le respect des droits de l'homme, des libertés fondamentales, de la démocratie et de la primauté du droit et qui favorise le dialogue multilatéral et la coopération entre ses membres.
Avec les conflits qui découlent de l'éclatement de la Yougoslavie en 1991, l'OTAN apporte, à partir de 1992, son soutien aux efforts des Nations-Unies et s'emploie avec d'autres organisations intergouvernementales et humanitaires à limiter les incidences de la guerre civile et à rétablir la paix. A cet effet, après la signature de l'accord de paix de Dayton en 1995, une force multinationale dirigée par l'OTAN opérant sous mandat des Nations-Unies est créée pour mettre en oeuvre les aspects militaires de l'Accord de paix en Bosnie. Cette Force de mise en oeuvre (IFOR) fait ensuite place à une force de stabilisation (SFOR) plus réduite, chargée de jeter les bases de l'exécution de l'Accord de paix en créant les conditions nécessaires à l'instauration de la démocratie et de la stabilité.
Ainsi, L’Alliance qui veut sauvegarder la sécurité commune de ses pays membres, par le biais d'une coopération politique et militaire, rencontre des difficultés résultant de l’engagement unilatéral des Etats-Unis en Afghanistan,
12. Analyse de l’intervention unilatérale des Etats –Unis en Afghanistan.
La priorité affichée par les responsables américains lors de l’intervention unilatérale en Afghanistan au nom de la lutte contre le terrorisme au lendemain du 11 septembre, est le maintien de leur supériorité tant économique que militaire, et pour ce, ils n’en sont pas à une contradiction près.
En ce qui concerne le droit international, certaines déclarations récentes sont éclairantes. Le porte-parole de Georges Bush, commentant le rejet de l’accord de Kyoto a déclaré : « Une forte consommation d’énergie fait partie de notre mode de vie et le mode de vie américain est sacré ». Or, les Etats-Unis, qui représentent 5% de la population mondiale, sont responsables de 25% du rejet des gaz à effet de serre que l’accord de Kyoto veut réduire. Concernant l’édifice des traités internationaux sur le contrôle des armements et le désarmement, patiemment élaboré depuis une quinzaine d’année, Richard Perle, conseiller du Ministre de la Défense a déclaré : « Les Etats-Unis ont un droit fondamental à se défendre comme ils l’entendent. Si un traité nous empêche d’exercer ce droit, alors il faut passer outre ».
Les Etats-Unis manifestent toujours la résistance à l’élaboration de normes internationales contraignantes, en voici quelques exemples :
Ø En juillet 2001, lors de la première Conférence des Nations unies sur la prolifération des armes légères, les Etats-Unis se sont opposés à toute clause internationale limitant la vente de telles armes à des acteurs autres que des Etats. Les évènements du 11 septembre 2001 ne semblent pas avoir modifié leur position à ce sujet.
Ø Grâce à la ratification de ses statuts par le 60ème Etat le 11 avril 2002, la Cour pénale internationale (CPI) mise en place le 1er juillet 2002. C’est un pas important vers la constitution d’une justice à l’échelle mondiale. Mais les Etats-Unis, qui sont l’un des Etats signataires du Traité de Rome (qui définit les statuts de la CPI), estiment n’avoir pas d’obligation légale résultant de la signature que l’administration Clinton avait donnée en décembre 2000, et l’ont signalé officiellement au Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, dans une lettre du 6 mai 2002 qui invalide de fait cette signature. Ils menacent même d’adopter une loi autorisant leur président à envoyer l’armée américaine à La Haye pour y récupérer un citoyen américain qui serait traduit devant cette Cour. Ils estiment que vu leurs responsabilités supérieures en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, leurs militaires doivent disposer d’une certaine liberté de manœuvre. Le président Bush envisagerait même de supprimer toute assistance militaire aux pays qui ratifient le traité. Quant aux soldats américains, ils ne participeront plus à une opération de maintien de la paix sans garantie d’immunité totale contre toute poursuite de la CPI, a déclaré le 20 mai l’ambassadeur américain à l’ONU, John Negroponte.
Ø Le Traité d’interdiction totale des essais nucléaires (TITEN) de 1996 bloqué par les Etats-Unis, qui ont boycotté la réunion de l’ONU en novembre 2001, augmentant ainsi le risque de voir d’autres pays, parfois instables, procéder également à ce type d’essais ;
Ø Le refus de signer le Traité international d’Ottawa de 1997 visant à l’interdiction totale des mines antipersonnel. Les Etats-Unis estiment en effet que ces armes sont indispensables pour assurer la sécurité du personnel militaire américain présent dans certains pays, et que leurs soldats doivent bénéficier d’un statut privilégié, toujours en fonction de leurs « responsabilités supérieures » ;
Ø Le rejet du protocole de vérification de la Convention sur les armes biologiques de 1972, lors de la Conférence de révision de cette Convention qui s’est tenue à Genève en décembre 2001 ; or, un mécanisme de contrôle s’avère indispensable, avec les progrès exponentiels des biotechnologies qui engendrent une prolifération verticale et horizontale des armes chimiques et biologiques ;
Ø En matière de droits de l’homme, les Etats-Unis n’ont toujours pas ratifié plusieurs accords importants des Nations unies, tels que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 ou encore la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes de 1979.
Washington s’est servi de l’attentat du World Trade Center et de l'attaque sur le Pentagone pour rallier les forces de l'OTAN, invoquant l'article cinq dans la charte de l'organisation, qui stipule que tous les membres de l'OTAN doivent répondre à une attaque dont a été victime l'un d'entre eux. Cela dans le but de:
Ø Réunir une « force de maintien de la paix » en Afghanistan;
Ø Lancer des attaques aériennes et possiblement au sol;
Ø Eliminer le gouvernement des Talibans;
Ø Prendre le contrôle directement via l'instauration d'une occupation militaire des États-Unis et de l'OTAN.
Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, contre le World Trade Center de New York et contre le Pentagone à Washington, plusieurs observateurs estimaient que deux scénarios pouvaient en découler. Le premier, optimiste, aurait été une prise de conscience et une autocritique des Américains. Se rendant compte qu’ils sont défiés par certains dans le monde, conséquence d’une politique menée de façon très militaire et unilatéraliste, ils pouvaient opter pour une politique extérieure coopérative dans un cadre multilatéral et privilégier la recherche de solutions politiques. Le second scénario imaginé par les observateurs était le durcissement de la politique américaine dans un sens encore plus militaire et unilatéraliste.
De plus, les deux mois qui ont suivi le 11 septembre semblaient confirmer la réalisation du premier scénario puisque la ligne modérée défendue par le Secrétaire d’Etat Colin Powell était suivie par l’administration Bush. Mais par la suite, l’entourage du président Bush, fit basculer la politique américaine dans le deuxième scénario. Ces attentats, auraient pu conduire à une remise à plat d’un jeu internationale qui était devenu incertain depuis la décomposition du système bipolaire. Face à de nouveaux enjeux, très éloignés des compétitions inter étatiques traditionnelles (la responsabilité des attentats a été immédiatement attribuée à AL-Qaïda dirigé par Oussama ben laden depuis l’Afghanistan), de nouvelles formes de multilatéralisme auraient pu s’imposer. Les choix effectués ont été tout différents : l’hiver 2001-2002 a été dominé par une confirmation de l’unilatéralisme américain qui, du coup, a favorisé une série de réactions en chaîne conduisant à une véritable crispation du système international, accentuant sa fragmentation et son défaut de concertation. On est probablement entré dans une dangereuse logique de cercle vicieux, entretenant instabilités et conflits autour des mirages de l’unipolarité.
Deux orientations ont semblé le caractériser. D’abord, sa fidélité à une vision messianique et moralisatrice du jeu international. Le discours sur l’ « état de l’union », tenu le 29 janvier 2002 par George W.Bush, mettant en évidence un « axe du mal » réunissant l’Iran, l’Irak et la Corée du Nord, a confirmé la promptitude de l’administration américaine à renouer avec des schémas bipartisans que la disparition de la guerre froide avait aboli. Tactiquement, une telle vision entretenait de façon quelque peu forcée un consensus minimal au sein de l’opinion américaine, permettant aux dirigeants sur place d’en tirer un réel bénéfice politique. En deuxième lieu, les médiations multilatérales ont vite été neutralisées : l’OTAN fut sollicitée pour confirmer sa solidarité avec les Etats unis, par le biais de son article 5, tandis que toute réforme en profondeur de l’alliance atlantique perdait son caractère d’urgence.
L’unilatéralisme est le principe par le quel un Etat impose ses choix à son environnement extérieur, au lieu de les concerter avec un autre partenaire (bilatéralisme) ou de les élaborer de façon collective au sein d’une organisation internationale (multilatéralisme). En effet, son retour en force est clairement apparu dans les jours qui suivirent l’attaque contre le World Trade Center. La résolution 1368 du conseil de sécurité de l’ONU, donnant immédiatement un blanc-seing aux Etats unis au non du principe de légitime de défense, en fut l'affabilité institutionnelle. Le mode de riposte, laissant peu de place à la concertation avec les alliés, en fut une traduction concrète. L’action militaire entreprise dès le 7 octobre en Afghanistan a confirmé cette option.
De plus, plusieurs discours du président Bush ou du ministre de la défense Donald Rumsfeld concrétisent cette évolution. Le 29 janvier 2002, le président Georges Bush dans son discours sur « l’axe du mal » constitué des trois Etats déviants avec les quels la puissance américaine entretenait les plus anciens contentieux, faits d’humiliations ( la prise d’otages à l’ambassade de Téhéran en 1979), de duperies ( mise en échec de l’accord de 1994 passé avec Pyongyang sur la non prolifération nucléaire) ou de défis ( du président Saddam Hussein rescapé de la guerre du golfe de 1991), a parfaitement défini la politique américaine en utilisant l’argument de la lutte contre le terrorisme pour annoncer au reste du monde les prochaines actions unilatérales et militaires des Etats-Unis. Le 31 janvier 2002, Donald Rumsfeld donnait d’autres précisions sur les objectifs de renforcement des capacités militaires américaines qui devront dorénavant être capables de se battre sur 4 théâtres régionaux majeurs, au lieu de 2 précédemment.
Enfin, La politique américaine au Moyen-Orient, qui est la région sans doute la plus armée et la plus « chaude » du monde est également symptomatique. Dans le conflit israélo-palestinien, bien que les Etats-Unis aient tenté de désamorcer l’engrenage attentats-répression, ils n’ont jamais véritablement condamné la politique musclée d’Ariel Sharon. Et concernant l’Irak, ils sont résolus à une action militaire unilatérale pour renverser Saddam Hussein.
Ainsi, les conceptions américaines en matière internationale sont dès lors inquiétantes pour ceux qui, comme les Européens, veulent privilégier l’action multilatérale et la recherche de solutions politiques plutôt que militaires entraînant de facto une discorde au sein de l’Alliance.
13. Dissension au sein de l’OTAN.
Cet unilatéralisme a semblé marquer un retour en force de la logique des intérêts nationaux, l’intérêt stratégique est évident dans la mesure où un tel jeu entrave toute possibilité de polarisation alternative.Face à une réactivation provoquée des liens entretenus par Washington avec Londres, puis avec la droite au pouvoir à Madrid et à Rome, l’Union européenne (UE) perd l’essentiel de son autonomie d’action.
En effet, la lutte contre le terrorisme en Afghanistan et son extension en Irak laisse les pays européens perplexes. Les Européens s’en remettent à la procédure onusienne et hésitent à adhérer à l’option militaire afin d’opérer un changement de régime à Bagdad. Le contentieux américano-iraquien continue donc de se développer dans un contexte politique agressif où les Etats-Unis se réservent une hégémonie sans partage sur le monde. Les événements tragiques du 11 septembre 2001 n’ont finalement que renforcé cette politique unilatéraliste, maintenue par la hausse des budgets de la défense, le développement des doctrines militaires, notamment nucléaires, et l’influence grandissante du lobby de l’industrie des armements.
Dans ce contexte, il est à craindre que les Etats-Unis se retrouvent piégés dans leur guerre globale contre le terrorisme et, en absence d’alternatives crédibles quant à leur politique au Moyen-Orient, suivent finalement les revendications des militaires et des éléments les plus conservateurs au sein de l’administration.
L'Alliance atlantique et son organisation militaire, nées en 1949, ont servi de structure au bloc occidental dirigé par les Etats-Unis durant les cinquante années suivantes, jusqu'à la fin de la guerre froide. Par l'intégration de leurs forces armées dans un système de défense placé sous un commandement américain, les Etats d'Europe de l'Ouest ont, en pratique, reconnu et assuré la prépondérance politique et stratégique des Etats-Unis sur l'Alliance et sur toute l'aire géographique qu'elle recouvrait. Seule la France a contesté et rejeté la dépendance qui en résultait. Le général de Gaulle a critiqué le système militaire intégré de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN), qui privait le pays de son indépendance en matière de défense, compromettant ainsi l'indépendance de sa politique étrangère. Par le jeu de l'intégration, la France risquait de se voir entraînée dans un conflit dont elle ne voudrait pas. Il en tira la conclusion en la retirant du Conseil des ministres de la défense de l'OTAN, de son Comité militaire, qui réunit les chefs d'états-majors des pays membres, et des commandements intégrés.
Mais l'Alliance atlantique et son organisation militaire continuèrent à fonctionner sans changement. La fin de la guerre froide aurait pu remettre en cause, sinon l'existence de l'alliance, du moins son fonctionnement, puisque sa raison d'être, toujours invoquée par les gouvernements occidentaux, était de faire face à une menace - réelle ou supposée - venant du camp de l'Est. Or ce camp n'existait plus. Pourtant, aucun des gouvernements européens n'a paru vouloir, à cette occasion, reprendre plus de liberté d'action. Tous, au contraire, se sont déclarés en faveur du maintien de l'OTAN, et même du renforcement de ses structures politiques et militaires. Les Etats-Unis, de leur côté, tout en retirant une part substantielle de leurs forces déployées jusque-là en Europe, ont tenu à maintenir une organisation qui assure leur prépondérance politique et stratégique sur le théâtre européen. Ils ont renforcé l'intégration des forces qui en dépendent, et ont obtenu qu'elles puissent intervenir hors de l'aire géographique constituée par le traité de l'Atlantique Nord. Les Etats-Unis ont ainsi pu faire de l'organisation politique et militaire de l'Alliance atlantique l'un des instruments privilégiés de leur politique étrangère. Les crises consécutives au démembrement de la Yougoslavie en ont été l'occasion.
Depuis la chute du mur de Berlin et la fin du Pacte de Varsovie, nous avons assisté au démantèlement du système de la guerre-froide. La participation de la Russie à la réunion de l’OTAN, annonce le début d'une nouvelle ère; celle de la reconstruction et de la mise en place d'une nouvelle configuration géostratégique.
En effet, créée afin de contrer la menace du bloc soviétique, et depuis la disparition de sa menace directe en 1989, l'OTAN a cherché longtemps une nouvelle " raison d'être ". Si sa participation disproportionnée dans les Balkans en 1999 - la date de son cinquantenaire, avait plus une valeur symbolique qu'opérationnelle (elle a montré avant toute autre chose sa difficulté à mener à bien une bataille terrestre), depuis l'invasion d'Afghanistan par les troupes américaines et la déclaration de lutte antiterroriste du président George W. Bush, il semble que l'OTAN s'est dotée d'une nouvelle légitimité ou plus exactement a donné un nouveau " sens à son existence ".
Officiellement, cette organisation, composée de 19 Etats membres serait amenée à assurer la sécurité collective des nations. Dans ce cadre, on est en droit de se demander quelle serait l'articulation des interventions entre l'ONU (Organisation internationale à vocation universelle) et l'OTAN essentiellement euro-américaine avec, une hégémonie militaire, politique et idéologique états-unienne.
Les Etats-Unis, usent de cet état de fait pour relancer une OTAN plus opérationnelle sur le plan de la gestion des conflits au nom de la lutte antiterroriste, et cela au détriment de cette universalité handicapée, lente et peu efficace.. La principale question est de savoir si cette nouvelle guerre longue et difficile, pourrait constituer un " sens " réel, solide et durable, pour justifier l'existence (et son renforcement) de cette Alliance militaire euro-américaine. N'oublions pas les promesses d'un " Nouvel Ordre Mondial " du président Reagan au lendemain de la chute du mur de Berlin ; ce paradigme n'a pas encore vu le jour que la guerre contre le régime de Bagdad et le maintien de Saddam Hussein au pouvoir, d'une part, et le soutien sans faille à l'Etat hébreu, d'autre part, l'ont vidé de tout son sens.
Certes, l’intervention unilatérale des Etats-Unis en Afghanistan a surpris l’Alliance, qui dans sa vocation prône plus une action d’ensemble qu’à l’unilatéralisme. Mais devant la difficulté de justifier cette intervention par l’article 5 du traité de Washington, l’OTAN a réagi timidement, ce qui n’a pas manqué d’engendrer des conséquences dans le fonctionnement de l’alliance. Cependant, aux dangers de cette crise, pourront succéder des perspectives plus prometteuses s’appuyant sur l’adaptation complète de son approche de la sécurité et sur la faculté d’anticiper sur les nouveaux défis et menaces qui l’interpellent en ce début du XXI° siècle.
II/.PERSPECTIVES STRATEGIQUES D’AVENIR :
La politique extérieure américaine engendre des crises graves au sein de l’OTAN, cependant, face à cette dérive, la nouvelle approche de la sécurité conjuguée à des principes de stratégie de défense et surtout de nouvelles orientations des forces de l’Alliance sont à même de contrer une récidive unilatérale.
21. Approche de la sécurité du 21° siècle.
La mission de l’OTAN qui est de garantir à ses pays membres la liberté devant leur permettre de perfectionner leurs sociétés, a été mise en œuvre par le biais d’une stratégie militaire suffisamment souple pour s’adapter à l’évolution de l’environnement stratégique.
L’Alliance est attachée à une approche globale de la sécurité, qui reconnaît l’importance de facteurs politiques, économiques, sociaux et environnementaux, en plus de l’indispensable dimension de défense. Elle se fonde sur cette approche globale pour accomplir efficacement ses tâches de sécurité fondamentales. Dès lors, il convient de mettre l’accent sur les nouvelles exigences issues du changement intervenu dans la nature de la menace depuis la fin de la guerre froide. Cela ne signifie pas qu’il faut renoncer aux systèmes de défense principaux, pas plus qu’à la fonction stabilisatrice de la dimension nucléaire qui conservera encore longtemps son importance pour l’OTAN. D’ailleurs, pour accomplir leurs nouvelles tâches avec efficacité et faire face aux nouveaux défis, les pays membres de l’OTAN doivent développer davantage leur coopération en matière d’armements. Les initiatives de l’OTAN adoptées par la conférence des directeurs nationaux des armements (CNAD) afin d’améliorer les échanges commerciaux en matière de défense et d’élaborer un code de conduite des échanges commerciaux liés à la défense, de même que l’initiative commerciale pour la défense, sont des éléments clés pou mener à bien la nouvelle coopération en matière d’armements au sein de l’OTAN.
La consolidation de l’enceinte transatlantique est donc indispensable, sous peine d’encourager des tendances cycliques à l’engagement unilatéral. Et pour cela, des consultations plus fréquentes sur les questions politico-militaires devraient être envisagée afin que les décisions d’engagement soient prises par l’OTAN et non par un seul des pays membres. L’intervention unilatérale des Etats-Unis, hier en Afghanistan et aujourd’hui en Irak est de nature à fausser la cohésion au sein de l’Alliance. Ce dont il est possible d’éviter en agissant selon des actions concertées.
Autres questions cruciales pour l’avenir de l’Otan concernent son élargissement et le développement de la coopération avec les pays d’Europe centrale, ainsi que les activités de maintien de la paix et les interventions hors zone. La question de l’élargissement mérite un examen sérieux et par conséquent devra être progressive. L'Alliance reste ouverte à l'adhésion de nouveaux membres conformément à l'article 10 du Traité de Washington. Elle compte, dans les années à venir, lancer de nouvelles invitations à des pays désireux et capables d'assumer les responsabilités et les obligations liées au statut de membre, et dès lors que l'OTAN aura déterminé que l'inclusion de ces pays servirait les intérêts politiques et stratégiques généraux de l'Alliance, accroîtrait son efficacité et sa cohésion, et renforcerait la sécurité et la stabilité européennes en général. A cette fin, l'OTAN a mis au point un programme d'activités destiné à aider les pays qui aspirent à devenir membres à se préparer à une éventuelle adhésion future dans le contexte général de ses relations avec eux. Aucun pays européen démocratique dont l'admission répondrait aux objectifs du Traité ne sera exclu du processus d'examen.
Cependant, les coopérations en cours devraient être intensifiées particulièrement celles entre OTAN-IESD (Identité Européenne de Sécurité et de Défense), OTAN-Russie, OTAN-Ukraine, OTAN-Méditerranée. Le Partenariat pour la paix (PPP) est le principal mécanisme permettant d'établir des liens pratiques en matière de sécurité entre l'Alliance et ses Partenaires et de renforcer l'interopérabilité entre les Partenaires et l'OTAN. Dans le cadre de programmes détaillés qui reflètent les capacités et les intérêts propres de chaque Partenaire, Alliés et Partenaires s'emploient à promouvoir la transparence dans les plans et les budgets de défense nationaux, le contrôle démocratique des forces de défense, la préparation aux catastrophes civiles et autres situations d'urgence, et le développement de la capacité de travailler ensemble, y compris dans des opérations du PPP dirigées par l'OTAN. L'Alliance est résolue à donner aux Partenaires un rôle accru dans la prise de décision et la planification des activités du PPP, et à le rendre plus opérationnel. L'OTAN mènera des consultations avec tout participant actif au Partenariat qui constaterait l'existence d'une menace directe pour son intégrité territoriale, son indépendance politique ou sa sécurité.
L'Alliance, sur laquelle repose la défense collective de ses membres, et à travers laquelle les objectifs de sécurité communs seront poursuivis chaque fois que possible, reste attachée à un partenariat transatlantique équilibré et dynamique. Les Alliés européens ont pris des décisions qui leur permettront d'assumer de plus grandes responsabilités dans les domaines de la sécurité et de la défense, afin de renforcer la paix et la stabilité de la région euro-atlantique et, ainsi la sécurité de tous les Alliés. Sur la base des décisions que l'Alliance a prises à Berlin en 1996 et par la suite, l'identité européenne de sécurité et de défense continuera d'être développée au sein de l'OTAN. Ce processus exigera une coopération étroite entre l'OTAN, l'UEO et, lorsqu'il y aurait lieu, l'Union européenne. Il permettra à tous les Alliés européens d'apporter une contribution plus cohérente et plus efficace aux missions et activités de l'Alliance en tant qu'expression de leurs responsabilités partagées. Il renforcera le partenariat transatlantique, et il aidera les Alliés européens à agir eux-mêmes selon les besoins, parce que l'Alliance est prête à mettre ses moyens et capacités à contribution, au cas par cas, et par consensus, pour des opérations dans lesquelles elle ne serait pas engagée militairement et qui seraient menées sous le contrôle politique et la direction stratégique assurés soit par l'UEO, soit de toute autre façon convenue, en tenant compte de la pleine participation de tous les Alliés européens, si ceux-ci faisaient un choix en ce sens.
La Russie joue un rôle unique s'agissant de la sécurité euro-atlantique. Dans le cadre de l'Acte fondateur OTAN-Russie sur les relations, la coopération et la sécurité mutuelles, l'OTAN et la Russie se sont engagées à développer leurs relations sur la base de l'intérêt commun, de la réciprocité et de la transparence, en vue d'établir dans la région euro-atlantique une paix durable et ouverte à tous, sur la base des principes de la démocratie et de la sécurité coopérative. L'OTAN et la Russie sont convenues de donner une expression concrète à leur engagement commun de construire une Europe stable, pacifique et sans division. L'existence, entre elles, d'un partenariat fort, stable et durable est indispensable à l'instauration d'une stabilité pouvant se perpétuer dans la région.
L'Ukraine occupe une place spéciale dans l'environnement de sécurité euro-atlantique; c'est un partenaire important, dont l'apport est très utile, pour la promotion de la stabilité et des valeurs démocratiques communes. L'OTAN est résolue à renforcer encore, sur la base de la Charte OTAN-Ukraine, son partenariat spécifique avec cette dernière, y compris les consultations politiques sur des questions d'intérêt commun et une large gamme d'activités de coopération pratique. L'Alliance continuera de soutenir la souveraineté et l'indépendance, l'intégrité territoriale, le développement démocratique et la prospérité économique de l'Ukraine, ainsi que son statut d'Etat non doté d'armes nucléaires, qui constituent des facteurs essentiels de stabilité et de sécurité dans l'ensemble de l'Europe.
La Méditerranée est une région d'un intérêt particulier pour l'Alliance. La sécurité en Europe est étroitement liée à la sécurité et à la stabilité en Méditerranée. Le processus de Dialogue méditerranéen, ouvert par l'OTAN, fait partie intégrante de l'approche coopérative de l'OTAN vis-à-vis de la sécurité. Il fournit un cadre pour le développement de la confiance, favorise la transparence et la coopération dans la région, et est renforcé par d'autres actions menées au niveau international. L'Alliance est résolue à développer progressivement les aspects politiques, civils et militaires du Dialogue en vue de parvenir à une coopération plus étroite avec les pays qui sont ses partenaires dans ce Dialogue et de susciter un engagement plus actif de ces derniers.
Le rôle de l’Alliance dans le maintien de la paix devra être réexaminé et soigneusement analysé. Les efforts de l’OTAN en BOSNIE et au KOSSOVO sont payants mais pouvaient l’être davantage avec de meilleures prévisions. Dans tous les cas, certaines exigences fondamentales doivent être satisfaites pour de telles opérations de maintien de la paix : un mandat clair et précis des Nations Unies, de l’autonomie de la chaîne de commandement de l’OTAN et la synergie avec d’autres organisations. Il est à signaler aujourd’hui qu’aucune organisation internationale ne peut à elle seule, maîtriser les implications complexes des nouvelles exigences de la gestion des crises, pas plus que toutes les dimensions de la définition élargie de la sécurité, s’appliquant désormais aussi bien aux questions militaires, financières et économiques qu’à la maîtrise des armements, aux droits de l’homme et aux tâches politiques.
La tâche principale à laquelle la communauté internationale est confrontée en termes de gestion de crises ne se résume pas au maintien de la paix, mais englobe également des activités plus complexes d’instauration et d’imposition de la paix. Ainsi, s’impose la définition d’une plus large gamme de mesure de gestion des crises pouvant être mises en œuvre au moyen d’un effort de coopération entre les diverses organisations internationales, et sur lequel la communauté internationale pourrait compter.
La question de la gestion des crises est étroitement liée à celle de l’intervention hors zone. Les changements en cours dans la structure de l’OTAN tels que la création de forces d’action rapide, qui s’avèrent très efficaces pour les opérations de maintien de la paix, doivent prendre en compte le besoin de souplesse dans l’utilisation des forces pour affronter les nouvelles menaces dans le cadre de la sécurité de l’Alliance. Certes, une telle souplesse est déjà envisagée par le concept et trouve son expression dans la philosophie qui inspire la révision en profondeur de la défense aux Etats-Unis, mais l’OTAN doit toujours veiller à ce que sa mise en œuvre entre dans le cadre de l’Alliance.
Le maintien d’un potentiel militaire adéquat et une volonté manifeste d’agir collectivement pour la défense commune restent essentiels à la réalisation des objectifs de l’Alliance sur le plan de la sécurité. Un tel potentiel, de même que la solidarité politique, reste indispensable pour que l’Alliance puisse prévenir toute tentative de coercition ou d’intimidation, et garantir qu’une agression militaire contre elle ne puisse à aucun moment être perçue comme une option offrant une perspective quelconque de succès.
L’existence de capacités militaires efficaces dans toutes les circonstances prévisibles est aussi fondamentale pour permettre à l’Alliance de contribuer à la prévention de l’article 5 . Ces missions peuvent être hautement exigeantes et nécessiter les mêmes qualités politiques et militaires : cohésion, entraînement multinational, travail approfondi de planification préalable, etc.…, que celles qui seraient essentielles dans une situation relevant de l’article 5. C’est pourquoi, si elles peuvent imposer des exigences spécifiques, elles seront néanmoins traitées dans le cadre d’un ensemble commun des structures et de procédures alliées.
La politique de soutien de l’Alliance à la maîtrise des armements, au désarmement et à la non prolifération, continuera de jouer également un rôle majeur dans la réalisation des objectifs de sécurité de l’Alliance. L’objectif principal de l’OTAN sera d’accroître la sécurité et la stabilité au niveau des forces le plus bas qui puisse être atteint tout en maintenant la capacité de l’Alliance dans les possibilités d’assurer la défense collective et d’accomplir la gamme complète de ses missions. Et comme il s’agit d’un élément important de son approche globale de sécurité, l’Alliance continuera de veiller à ce que les objectifs en matière de défense et de maîtrise des armements, de désarmement et de non-prolifération restent en harmonie. Elle continuera de contribuer activement à l’élaboration d’accords sur la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération, ainsi que de mesures de confiance et de sécurité. D’ailleurs, l’OTAN accentuera les efforts qu’elle déploie sur le plan politique en vue de réduire les risques découlant de la prolifération des armes de destruction massive et leurs vecteurs. Le but principal de l’Alliance et de ses membres dans le domaine de la non-prolifération consiste à la prévention ou, si elle se produit, à en inverser le cours par des moyens diplomatiques.
Ainsi, une bonne approche de la sécurité reste indispensable, mais pour que l’Alliance puisse s’acquitter parfaitement de ses tâches, elle devra s’appuyer sur des principes stratégiques nouveaux.
22. Les principes de la stratégie de défense de l’OTAN.
La conservation des moyens nécessaires pour l’exécution de la gamme complète des missions de l’OTAN, le développement de l’unité stratégique et les principes de solidarité entre pays alliés ainsi que le partage équitable des rôles, des risques et des responsabilités liés à la défense commune, permettront à l’Alliance de faire face, dans l’unité, aux nouveaux défis qui l’interpellent.
L’OTAN devra conserver les capacités militaires nécessaires pour l’exécution de la gamme complète de ses missions. Les principes de solidarité entre pays alliés et l’unité stratégique restent primordiaux pour l’accomplissement de telles missions. Les forces de l’Alliance doivent sauvegarder l’efficacité militaire et la liberté d’action de l’OTAN. La sécurité est indivisible : une attaque contre l’un d’eux est une attaque contre tous. En ce qui concerne la défense collective aux termes de l’article 5 du traité de Washington, les forces combinées de l’Alliance doivent être capables de décourager toute agression partielle dirigée contre elle, d’arrêter la progression d’un agresseur aussi loin à l’avant que possible, si une attaque devait néanmoins se produire et d’assurer l’indépendance politique et l’intégrité territoriale de ses Etats membres. Elles doivent également être prêtes à contribuer à la prévention des conflits et à conduire des opérations de réponse aux crises ne répondant pas de l’article 5. Les forces de l’Alliance ont un rôle essentiel à jouer pour promouvoir la compréhension et la coopération de ses partenaires, notamment en les aidant à se préparer à une participation potentielle à des opérations de maintien de la paix dont l’OTAN en dirigerait le commandement. Ainsi, elles contribuent à la préservation de la paix, à la sauvegarde des intérêts de sécurité communs des membres de l’Alliance et au maintien de la sécurité et de la stabilité de la région euro-atlantique. En décourageant l’usage d’armes NBC, elles contribuent aux efforts de l’OTAN visant à prévenir la prolifération de ces armes et de leurs vecteurs.
Le partage équilibre des rôles, des risques et des responsabilités, liés à la défense commune est indispensable à la réalisation des objectifs de l’OTAN. La présence de forces conventionnelles et de forces nucléaires américaines en Europe reste essentielle pour dissuader toute forme d’agression contre l’un des pays membres, et garantit par la même occasion la sécurité de ce continent qui est indissociablement liée à celle de l’Amérique du Nord. L’OTAN est donc viable que si ces deux continents visent le même objectif et coordonnent du coût leurs actions ; d’ailleurs les alliés nord américains ne cessent d’apporter une contribution à l’OTAN en mettant à sa disposition des forces militaires pour l’accomplissement de ses missions en contribuant dans un contexte plus large à la paix et à la sécurité internationales et en fournissant des installations d’entraînement uniques disponibles sur le continent nord américain.
Les alliés européens apportent également leur contribution à la défense commune ainsi qu’à la paix et à la stabilité internationales, grâce à des fonctions multinationales. Le principe de l’effort collectif pour la défense de l’Alliance est incarné par des dispositions pratiques qui apportent aux alliés les avantages de première importance découlant, sur les plans politique et militaire comme sur celui des ressources, d’une défense collective, et qui empêchent le retour à des politiques de défense purement nationales, sans priver les alliés de leur souveraineté. Ces dispositions permettent également aux forces de l’OTAN de mener des opérations de réponse aux crises ne répondant pas de l’article 5 et constituent à une condition préalable à une réponse cohérente de l’Alliance à toutes les situations possibles. Elles se fondent sur des procédures de consultation, une structure militaire intégrée et des accords de coopération. Parmi les éléments clés de ces dispositions figurent des plans de forces collectifs, un financement commun, des plans opérationnels communs, des arrangements relatifs à des formations, à des quartiers généraux et à des commandements multinationaux, un équilibre des rôles et des responsabilités entre les alliés, un système de défense aérienne intégrée, le stationnement et le déploiement des forces hors de leur territoire national en cas de besoin. L’inclusion des partenaires de l’OTAN dans de tels arrangements ou la mise au point d’arrangements similaires pour eux , dans les domaines appropriés contribue également à renforcer la coopération et les efforts communs sur les questions liées à la sécurité euro-atlantique.
Le financement multinational , notamment au titre du budget militaire et du programme OTAN d’investissement au service de la sécurité continuera de jouer un rôle important pour l’acquisition et le maintien des moyens et capacités nécessaires à l’alliance pour pouvoir faire face aux nouveaux défis et menaces. La gestion des ressources devra être guidée par l’évolution des besoins militaires de l’Alliance. L’OTAN soutient la poursuite du développement de l’IESD au sein de l’Alliance, y compris en étant prête à mettre à contribution des moyens et des capacités pour des opérations menées sous le contrôle politique et la direction stratégique assurés soit par l’UEO, soit de toute autre façon convenue.
Pour protéger la paix et prévenir la guerre ou toute forme de coercition, l’Alliance devra maintenir dans l’avenir une combinaison appropriée de forces nucléaires et de forces conventionnelles basée en Europe et les tenir en permanence à niveau face à l’évolution de la menace .Compte tenu de la diversité des risques auxquels elle pourrait être confrontée , l’Alliance doit garder les forces nécessaires pour assurer une dissuasion crédible et être en mesure de choisir entre une large gamme de riposte conventionnelle . Mais ces forces conventionnelles ne peuvent à elles seules assurer une dissuasion crédible. Les armes nucléaires apportent une contribution unique en rendant incalculables et inacceptables les risques que comporterait une agression contre l’Alliance. Elles restent donc indispensables au maintien de la paix.
Les forces de l’Alliance ont pour rôle principal de protéger la paix et garantir l’intégrité territoriale, l’indépendance politique et la sécurité des Etats membres. Elles doivent donc être capables d’assurer une dissuasion et une défense efficaces, de maintenir ou rétablir l’intégrité territoriale des pays alliés et, en cas de conflit, de mettre fin à la guerre rapidement, en amenant un agresseur à reconsidérer sa décision, à cesser son attaque et à se retirer. Le maintien de la sécurité et de la stabilité de la région euro-atlantique revêt une importance primordiale. Un objectif important de l’alliance et de ses forces consiste à écarter les risques en faisant face rapidement aux crises potentielles. En cas de crise mettant en danger la stabilité euro-atlantique et pouvant nuire à la sécurité des membres de l’Alliance, les forces militaires alliées pourraient être appelées à conduire des opérations de réponse aux crises. Elles pourraient également être appelées à contribuer à la préservation de la paix et de la sécurité internationale en conduisant des opérations à l’appui d’autres organisations internationales, complétant et renforçant les actions politiques dans le cadre d’une approche globale de la sécurité. En contribuant à la gestion des crises par des actions militaires, les forces de l’Alliance devront compter avec un ensemble plus complexe et plus divers d’acteurs, de risques, de situations et d’exigences, y compris des urgences humanitaires.
Des forces bien entraînées et bien équipées, d'un niveau de préparation adéquat et en nombre suffisant pour pouvoir faire face à la gamme complète des situations possibles, ainsi que des structures de soutien, des outils de planification, et des capacités de commandement et de contrôle appropriées, sont essentiels pour permettre de fournir des contributions militaires efficaces. La participation potentielle de pays partenaires et d'autres pays non membres de l'OTAN à des opérations dirigées par l'OTAN ainsi que d'éventuelles opérations menées avec la Russie seraient d'autres éléments précieux de la contribution de l'OTAN à la gestion de crises mettant en cause la sécurité euro-atlantique.
Les forces militaires de l'Alliance contribuent également à promouvoir la stabilité dans l'ensemble de la région euro-atlantique par leur participation à des contacts entre militaires ainsi qu'à d'autres activités de coopération et exercices dans le cadre du Partenariat pour la paix, en plus de ceux qui sont organisés pour approfondir les relations de l'OTAN avec la Russie, l'Ukraine et les pays participant au Dialogue méditerranéen. Elles contribuent à la stabilité et à la compréhension en participant à des activités qui renforcent la confiance, y compris à celles qui accroissent la transparence et améliorent la communication, de même qu'à la vérification d'accords de maîtrise des armements et à des opérations de déminage humanitaire. Les principaux domaines de consultation et de coopération pourraient être notamment les suivants : entraînement et exercices, interopérabilité, relations civilo-militaires, élaboration de concepts et de doctrines, plans de défense, gestion des crises, problèmes liés à la prolifération, coopération en matière d'armements et participation à la planification opérationnelle et à des opérations.
Ainsi, le fonctionnement harmonieux de l’Alliance repose donc sur le principe stratégique adéquat qui impose nécessairement de nouvelles orientations ainsi qu’une réadaptation des forces.
23. Nouvelles orientations et caractéristiques des forces de l’Alliance.
Pour que l’Alliance puisse accomplir ses tâches de sécurité fondamentales et appliquer les principes de sa stratégie, il faut poursuivre l’adaptation de ses forces de façon qu’elles puissent répondre avec efficacité aux exigences de la gamme complète des missions de sécurité et relever les défis futurs.
La taille, le niveau de préparation et de disponibilité, et le déploiement des forces militaires de l’Alliance refléteront son attachement à la défense collective et à la conduite d’opérations de réponse aux crises, parfois sur court préavis, loin de leurs bases nationales, y compris au delà du territoire des Alliés. Les caractéristiques des forces devront tenir compte également des dispositions des accords pertinents de maîtrise des armements. Ces forces doivent être suffisantes en nombre et en capacités pour décourager et repousser une agression contre l'un des Alliés. Elles doivent être interopérables, et disposer des doctrines et des technologies appropriées. Elles doivent être maintenues au niveau de préparation et de déployabilité requis et être capables de remporter un succès militaire dans une large gamme d'opérations interarmées et multinationales complexes, qui peuvent aussi faire intervenir des pays partenaires et d'autres pays non membres de l'OTAN.
Cela signifie en particulier :
Ø que la taille globale des forces des Alliés sera maintenue aux niveaux minimums compatibles avec les besoins de la défense collective et des autres missions de l'Alliance; elles seront tenues à un niveau de préparation approprié et gradué;
Ø que la répartition géographique des forces en temps de paix assurera une présence militaire suffisante sur l'ensemble du territoire de l'Alliance, y compris le stationnement et le déploiement de forces hors du territoire national et des eaux nationales et le déploiement de forces à l'avant, où et quand ce sera nécessaire. Il faudra tenir compte des considérations régionales, en particulier des éléments géostratégiques, qui existent au sein de l'Alliance, les instabilités à la périphérie de la zone de l'OTAN pouvant déboucher sur des crises ou des conflits exigeant une réponse militaire de l'Alliance, avec des délais d'alerte potentiellement courts;
Ø que la structure de commandement de l'OTAN sera capable d'assurer le commandement et le contrôle de la gamme complète des missions militaires de l'Alliance, y compris par l'utilisation de QG multinationaux et interarmées faciles à déployer. Elle sera également capable de soutenir des opérations menées sous le contrôle politique et la direction stratégique assurés soit par l'UEO, soit de toute autre façon convenue, contribuant ainsi au développement de l'IESD au sein de l'Alliance, et de conduire des opérations de réponse aux crises ne relevant pas de l'article 5 dirigées par l'OTAN auxquelles des pays partenaires et d'autres pays pourront participer ;
Ø que, d'une manière générale, l'Alliance devra, à la fois à court terme et à long terme, et pour la gamme complète de ses missions, posséder des capacités opérationnelles essentielles telles qu'un potentiel efficace de prise à partie, la faculté de déploiement et la mobilité (avec une force de réaction rapide qui sera fonctionnelle en 2004), la viabilité des forces et de l'infrastructure, ce qui inclut la logistique et la rotation des forces. Pour développer ces capacités au maximum en vue d'opérations multinationales, il sera important d'assurer l'interopérabilité, y compris sur le plan humain, d'utiliser une technologie avancée appropriée, de maintenir la supériorité en matière d'information dans des opérations militaires, et de disposer d'un personnel polyvalent hautement qualifié. L'existence de capacités suffisantes dans les domaines du commandement, du contrôle et des communications ainsi que du renseignement et de la surveillance contribuera à l'efficacité des forces;
Ø qu'à tout moment, une proportion limitée mais militairement significative de forces terrestres, aériennes et navales seront capables de réagir avec la rapidité nécessaire à une large gamme de situations, y compris à une attaque sur court préavis contre un Allié quelconque. Davantage d'éléments de forces seront disponibles à des niveaux appropriés de préparation pour soutenir des opérations prolongées, à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire de l'Alliance, y compris par la rotation de forces déployées. Ensemble, ces forces devront également être d'un niveau qualitatif et quantitatif ainsi que d'un niveau de préparation suffisants pour contribuer à la dissuasion et pour assurer une défense contre des attaques limitées visant l'Alliance;
Ø que l'Alliance doit être capable d'aligner des forces plus importantes, à la fois pour répondre à des changements fondamentaux dans l'environnement de sécurité et pour faire face à des besoins limités, par le renforcement, par la mobilisation de réserves, ou par la reconstitution de forces, quand ce sera nécessaire. Cette capacité doit être proportionnelle aux menaces potentielles pour la sécurité de l'Alliance, y compris les développements potentiels à long terme. Elle doit tenir compte de la possibilité d'améliorations substantielles dans la préparation et les capacités de forces militaires présentes à la périphérie de l'Alliance. Les capacités de renforcement et de réapprovisionnement en temps voulu, à la fois en Europe et en Amérique du Nord et à partir de celles-ci, resteront d'une importance primordiale, d'où la nécessité d'un haut degré de déployabilité, de mobilité et de flexibilité;
Ø que des structures de forces et des procédures appropriées, y compris celles qui permettraient d'augmenter, de déployer et de réduire des forces de façon rapide et sélective, sont nécessaires pour assurer des réponses mesurées, souples et intervenant en temps voulu afin de réduire et désamorcer les tensions. Ces dispositions doivent être régulièrement mises à l'épreuve lors d'exercices en temps de paix;
Ø que le dispositif de défense de l'Alliance doit être capable de faire face de façon appropriée et efficace aux risques liés à la prolifération des armes NBC et de leurs vecteurs, qui représentent également une menace potentielle pour les populations, le territoire et les forces des Alliés. Une combinaison équilibrée de forces, de capacités de réponse et de défenses renforcées est nécessaire;
Ø que les forces et l'infrastructure de l'Alliance doivent être protégées contre des attaques terroristes.
Il est en outre essentiel que la capacité des forces militaires des Alliés devant remplir toute la gamme des missions de l'Alliance soit réellement crédible. Cet impératif a des incidences pour les structures des forces, les niveaux de forces et d'équipement, l'état de préparation et de disponibilité, l'entraînement et les exercices, les options de déploiement et d'utilisation, et l'aptitude à constituer des forces plus importantes et à mobiliser des forces. Il convient de rechercher le meilleur équilibre possible entre : les forces à niveau de préparation élevé, capables de commencer rapidement, et immédiatement si c'est nécessaire, des opérations de défense collective ou des opérations de réponse aux crises ne relevant pas de l'article 5; les forces d'un niveau de préparation moins élevé, et variable, qui constitueront la majeure partie des forces nécessaires pour assurer la défense collective ou pour permettre une rotation des forces en vue de soutenir des opérations de réponse aux crises, ou pour renforcer encore les éléments en place dans telle région; et une capacité de constituer et de compléter, à plus long terme, des forces pour le scénario le plus défavorable, bien que très éloigné, à savoir des opérations de défense collective de grande envergure.
Les forces des Alliés seront structurées de manière à tenir compte de la nature multinationale et interarmées des missions de l'Alliance. Les tâches essentielles consisteront notamment à contrôler, protéger et défendre un territoire, à assurer l'utilisation sans entrave des lignes maritimes, aériennes et terrestres de communication, à protéger le déploiement des moyens de dissuasion embarqués de l'Alliance, à conduire des opérations aériennes indépendantes et multinationales, à assurer la sécurité de l'environnement aérien et une défense aérienne élargie et efficace, la surveillance, le renseignement, la reconnaissance et la guerre électronique, le transport stratégique, ainsi qu'à mettre en place des installations de commandement et de contrôle efficaces et souples, y compris des quartiers généraux interarmées et multinationaux faciles à déployer.
Les moyens de défense de l'Alliance contre les risques et les menaces potentielles de prolifération des armes NBC et de leurs vecteurs doivent continuer d'être améliorés, y compris par des travaux sur une défense antimissile. Etant donné que les forces de l'Alliance peuvent être appelées à opérer au-delà des frontières de la zone de l'OTAN, il faut disposer de moyens souples, mobiles et aptes à soutenir des opérations prolongées, pour faire face aux risques de prolifération. Les doctrines et les plans, ainsi que les politiques en matière d'entraînement et d'exercices, doivent également préparer l'Alliance à assurer une dissuasion et une défense contre l'utilisation d'armes NBC. Il s'agit en effet de réduire encore les vulnérabilités opérationnelles des forces militaires de l'OTAN, tout en préservant leur flexibilité et leur efficacité malgré la présence, la menace ou l'utilisation d'armes NBC.
La stratégie de l'Alliance ne fait intervenir aucun moyen de guerre chimique ou biologique. Les Alliés sont favorables à une adhésion universelle aux régimes de désarmements applicables. Cependant, même si de nouveaux progrès peuvent être réalisés en ce qui concerne l'interdiction des armes chimiques et biologiques, des mesures de précaution prises à titre défensif n'en resteront pas moins essentielles.
Etant donné la réduction des niveaux de forces globaux ainsi que la limitation des ressources, la capacité de collaborer étroitement, demeurera indispensable à l'accomplissement des missions de l'Alliance. Les arrangements concernant la défense collective de l'Alliance, dans lesquels, pour les pays concernés, la structure militaire intégrée joue le rôle clé, sont essentiels à cet égard. Les différents éléments du processus de planification de la défense de l'OTAN doivent faire l'objet d'une coordination efficace à tous les niveaux pour assurer la préparation des forces et des structures de soutien pour l'ensemble de leurs divers rôles. Des échanges d'informations entre les Alliés au sujet de leurs plans de forces contribuent également à assurer la disponibilité des capacités nécessaires à l'exécution de ces rôles. Il demeure aussi primordial de procéder à des consultations en cas de changements importants dans les plans de défense des pays. La coopération dans l'établissement de nouveaux concepts opérationnels sera essentielle pour répondre à l'évolution des défis de sécurité. Les dispositions pratiques détaillées qui ont été mises au point dans le cadre de l'IESD au sein de l'Alliance favorisent une étroite coopération alliée, sans créer de doubles emplois inutiles de moyens et de capacités.
Afin de pouvoir s'adapter à toutes les circonstances possibles et conduire efficacement ses missions, l'Alliance a besoin de capacités logistiques suffisantes, y compris dans le domaine des transports, d'aide médicale et de stocks pour déployer et pour soutenir tous les types de forces avec efficacité. La normalisation favorisera la coopération et l'efficacité financière lors de la fourniture d'un soutien logistique aux forces alliées. La mise sur pied et la conduite soutenue d'opérations hors du territoire des Alliés, où le soutien assuré par le pays hôte pourrait être limité, voire inexistant, poseront des problèmes logistiques particuliers. La capacité de constituer en temps voulu des forces plus importantes, dûment équipées et entraînées, et d'un niveau permettant d'accomplir la gamme complète des missions de l'Alliance, constituera également un atout essentiel pour la gestion des crises et la défense. Cela englobera la capacité de renforcer toute région qui serait en danger et d'établir une présence multinationale où et quand il le faudrait. Des forces de divers types et de divers niveaux de préparation pourront être employées avec souplesse dans le cadre d'un renforcement intra-européen ou transatlantique. Cela exigera la maîtrise des lignes de communication, ainsi que des dispositions appropriées en ce qui concerne le soutien et les exercices.
L'interaction entre les forces de l'Alliance et l'environnement civil (gouvernemental ou non) où elles évoluent est indispensable au succès des opérations. La coopération civilo-militaire repose sur une relation d'interdépendance : les autorités civiles ont de plus en plus besoin de moyens militaires, tandis que, dans le même temps, il importe que le secteur civil apporte un soutien aux opérations militaires dans les domaines de la logistique, des communications, du soutien médical et des affaires publiques. La coopération entre les organismes militaires et civils de l'Alliance restera par conséquent essentielle.
La capacité de l'Alliance d'accomplir la gamme complète de ses missions dépendra de plus en plus du recours à des forces multinationales complétant les apports nationaux à l'OTAN pour les Alliés concernés. L'existence de telles forces, qui sont utilisables pour la gamme complète des missions de l'Alliance, témoigne de la résolution de cette dernière de conserver une défense collective crédible, accroît sa cohésion, renforce le partenariat transatlantique et consolide l'IESD au sein de l'Alliance. Les forces multinationales, en particulier celles qui sont capables de se déployer rapidement pour mettre en oeuvre une défense collective ou pour mener des opérations de réponse aux crises ne relevant pas de l'article 5, renforcent la solidarité. Elles peuvent aussi offrir la possibilité de déployer des formations plus performantes que ne le seraient peut-être des éléments purement nationaux, contribuant ainsi à une utilisation plus efficace des ressources comptées qui sont disponibles pour la défense. Il pourrait être nécessaire à ce titre d'adopter une approche multinationale hautement intégrée vis-à-vis de tâches et de fonctions spécifiques. Dans le cadre d'opérations de soutien de la paix, des formations multinationales efficaces et d'autres arrangements associant des Partenaires seront très utiles. Pour permettre d'exploiter pleinement le potentiel offert par les formations multinationales, il est primordial d'améliorer l'interopérabilité, notamment par un entraînement et des exercices suffisants.
Enfin, il est à noter que l'objectif fondamental des forces nucléaires des Alliés restera politique : préserver la paix et prévenir la coercition ainsi que toute forme de guerre. Elles continueront à jouer un rôle essentiel en maintenant tout agresseur dans le doute quant à la façon dont les Alliés riposteraient en cas d'agression militaire. Elles démontrent qu'une agression, quelle qu'en soit la forme, n'est pas une option rationnelle. La garantie suprême de la sécurité des Alliés est apportée par les forces nucléaires stratégiques de l'Alliance, en particulier celles des Etats-Unis; les forces nucléaires indépendantes du Royaume-Uni et de la France, qui ont un rôle de dissuasion propre, contribuent à la dissuasion globale et à la sécurité des Alliés.
La crédibilité du dispositif nucléaire de l'Alliance et la démonstration de la solidarité de ses membres ainsi que de leur volonté commune de prévenir la guerre exigent toujours que les Alliés européens concernés par la planification de la défense collective participent largement aux rôles nucléaires, au stationnement en temps de paix de forces nucléaires sur leur territoire, et aux dispositions de commandement, de contrôle et de consultation. Les forces nucléaires basées en Europe et destinées à l'OTAN constituent un lien politique et militaire essentiel entre les membres européens et les membres nord-américains de l'Alliance. C'est pourquoi celle-ci maintiendra des forces nucléaires adéquates en Europe. Ces forces doivent réunir les caractéristiques nécessaires et avoir la flexibilité et la capacité de survie appropriées pour qu'elles soient perçues comme un élément crédible et efficace de la stratégie des Alliés visant à prévenir la guerre. Elles seront donc maintenues au niveau minimum suffisant à préserver la paix et la stabilité.
L’OTAN ; point de situation stratégique et perspectives d’avenir |